Guide pratique de la ventilation des sorbonnes de laboratoire INRS

1.1. Généralités

Les sorbonnes sont des enceintes ventilées en dépression qui aspirent l’air dans le local et le rejettent dans l’atmosphère extérieure au moyen d’un ventilateur. Il s’agit d’équipements de protection collective destinés principalement à protéger les opérateurs des risques d’inhalation de produits chimiques dangereux.

Les sorbonnes sont utilisées pour la protection des opérateurs contre les polluants gazeux et particulaires, à l’exclusion des micro-organismes et des particules radioactives. Elles peuvent également agir comme extracteurs de polluants dégagés massivement lors de fuites accidentelles. Ce sont des dispositifs de captage enveloppants dont l’usage est très répandu [1,2].

Le volume de travail de la sorbonne est délimité par des parois fixes et un écran composé d’une ou plusieurs parois mobiles et transparentes (voir figures 1 et 2). Le fonctionnement normal de la sorbonne, pendant les phases de dégagement des polluants, requiert la fermeture partielle, voire maximale, de l’écran. Par fermeture partielle, il faut entendre la fermeture juste compatible avec la possibilité pour l’opérateur d’introduire ses bras et d’effectuer les mouvements nécessaires à la manipulation. La fermeture maximale ménage une surface d’entrée d’air suffisante pour empêcher la réduction excessive de la ventilation ou la création de courants d’air internes exagérés. Dans ce cas, l’introduction des bras n’est plus possible, à moins que l’écran soit muni d’opercules mobiles.

La position de l’écran doit être adaptée à la phase de travail avec pour objectif de réduire au maximum l’ouverture.

On peut distinguer :

  • la position de travail, appliquée lors des phases de dégagement des polluants, comprise entre les fermetures partielle et maximale définies ci-dessus ;
  • la position de maintenance qui délimite une ouverture plus grande, nécessaire à l’entretien de la sorbonne ou à l’installation de matériel dans le volume de travail ; cette position ne doit pas être utilisée lors de la manipulation de produits dans la sorbonne car le confinement n’est alors pas suffisant et la protection de l’opérateur en cas de projection est plus faible.

L’écran mobile, situé sur la face avant, peut être à mouvement vertical ou horizontal. La manœuvre manuelle de l’écran est facilitée par un dispositif d’équilibrage. Lorsque l’écran est à mouvement horizontal, il comporte plusieurs sections.

Certains écrans à mouvement vertical sont composés de plusieurs sections à coulissement horizontal.

La position de l’écran détermine les dimensions de l’ouverture par laquelle un écoulement d’air caractérisé par sa vitesse – dite vitesse frontale – réalise le confinement des polluants générés dans le volume de travail.

Le plenum d’extraction, au dos de la sorbonne, répartit le débit d’air aspiré entre les fentes d’extraction, dont le nombre, la position et la largeur sont variables selon les constructeurs. Le conduit d’extraction est raccordé à un ventilateur.

Autrefois, dans la très grande majorité des cas, le ventilateur délivrait un débit constant quelle que soit la position de l’écran mobile. Dans le cas d’une telle sorbonne à débit constant, la vitesse frontale de l’air varie en proportion inverse de la surface de l’ouverture. Aujourd’hui, pour des questions d’économies d’énergie, de nombreuses sorbonnes sont installées avec 2 vitesses d’aspiration (Petite vitesse qui passe automatiquement en Grande vitesse à partir de 10-15 cm d’ouverture) ou sont à débit variable (voir § 1.2.).

Les types particuliers de sorbonnes décrits ci-après permettent de réaliser des économies d’énergie.

Toutefois, il convient dans tous les cas de minimiser le débit d’air en appliquant des principes de bon sens consistant, par exemple lors de la conception, à éviter des largeurs de sorbonnes excessives ou, en exploitation, à pratiquer l’intermittence de l’extraction.

1.2. Sorbonnes à débit variable

Le principe du débit d’air extrait variable en fonction de la surface de l’ouverture permet de limiter la vitesse frontale lorsque cette ouverture est réduite. Il présente en outre l’intérêt d’ajuster les rejets d’air chauffé au minimum requis par la ventilation efficace de la sorbonne. On notera que la réduction du débit d’extraction permet la réduction concomitante du bruit et des courants d’air produits par les bouches d’insufflation d’air dans les locaux.

La réduction du débit aspiré ne doit cependant pas se traduire, par défaut de dilution dans la sorbonne, par un accroissement de concentration des produits susceptibles d’être dégagés tel qu’il y ait dépassement des 25 % de la LIE (limite inférieure d’explosivité) à l’intérieur de la sorbonne.

La variation de débit peut être obtenue soit par paliers grâce à un ventilateur à deux ou trois vitesses, soit en continu par l’une des techniques sui- vantes (par ordre décroissant d’efficacité) : ventilateur à vitesse variable, inclineurs à l’aspiration, registre piloté. Le réglage du débit extrait est commandé par des capteurs de repérage de la position de l’écran ou par un capteur de vitesse d’air placé dans un orifice percé sur une paroi de la sorbonne. Ce dernier mesure la vitesse de l’air passant par l’orifice, qui est assimilée à la vitesse d’air frontale.

Les sorbonnes doivent assurer en permanence la protection des opérateurs. En raison de la complexité technique de ce type de sorbonne, il est impératif de faire appel à des concepteurs et des installateurs ayant une solide expérience des systèmes de régulation des débits extraits et de l’indispensable asservissement de la compensation d’air à l’extraction (voir § 5.1.). Le problème est encore plus délicat en présence de plusieurs ventilateurs et dans le cas de modifications d’installations existantes, avec le risque de déséquilibrer le fonctionnement aéraulique.

1.3. Sorbonnes à air auxiliaire

Le principe de fonctionnement des sorbonnes à air auxiliaire est d’alimenter partiellement la sorbonne avec de l’air pris directement à l’extérieur. Cet air subit donc un traitement climatique moins coûteux que celui pris dans le local. Par rapport au cas précédent, seul se pose le problème de réduction excessive du débit aspiré dans le local de travail, lorsque la ventilation générale du local est uniquement assurée par le fonctionnement des sorbonnes.

Une sorbonne à air auxiliaire externe (voir figure 3) est une sorbonne à laquelle est ajouté un système composé d’un conduit, d’un ventilateur et d’un caisson placé en partie supérieure de la face avant qui souffle un courant d’air vers le bas dans un plan parallèle à la face externe de l’écran. Certains caissons encadrent en plus les deux côtés de la sorbonne, soufflant l’air auxiliaire externe dans trois directions. Comme il existe un rapport nominal, déterminé par le fabricant, entre le débit de l’air auxiliaire et celui extrait par la sorbonne, il convient que le premier soit asservi au second.

Dans certaines réalisations, l’air auxiliaire est soufflé directement dans la sorbonne, dite alors à air auxiliaire interne. Cette disposition est critiquable car délicate à maîtriser ; elle risque de perturber l’écoulement interne de la sorbonne sans pour autant permettre de réduire le débit d’air chauffé aspiré par l’ouverture. De plus, le débit de l’air auxiliaire interne doit être adapté aux manipulations réalisées dans la sorbonne.

Les nombreuses réserves formulées ci-dessus se veulent dissuasives. La justification économique des sorbonnes à air auxiliaire doit faire l’objet, au cas par cas, d’une étude de rentabilité complète tenant compte des contraintes supplémentaires en matériel et entretien.

Les concentrations des polluants émis dans l’atmosphère des locaux doivent être maintenues les plus basses possibles, et en deçà des valeurs limites d’exposition professionnelles [3] lors- qu’elles existent. Cette exigence de réduction des concentrations au niveau le plus bas techniquement possible s’applique tout particulièrement aux produits CMR (cancérogène, mutagène, toxique pour la reproduction) pour lesquels la notion de valeur limite n’est pas adaptée.

Il n’existe pas de réglementation spécifique à la ventilation des laboratoires de chimie. Au sens de la réglementation concernant l’aération et l’assainissement des lieux de travail, un laboratoire de chimie est un local de travail à pollution spécifique.

Dans le cadre de cette réglementation, et plus généralement dans le cadre d’une démarche de prévention, il convient de privilégier les moyens de protection collective (voir encadré 1). Pour atteindre l’objectif de réduction de l’exposition, on utilise des dispositifs de ventilation, d’encoffrement et de captage des émanations au plus proche de leur point d’émission.

Les sorbonnes sont à considérer comme des dispositifs de captage enveloppant auxquels doit être associée une ventilation dite « de compensation » destinée à assurer une entrée d’air neuf correspondant au débit d’air extrait par les sorbonnes et autres dispositifs présents dans les locaux.